dimanche 23 mars 2025

L'idée reçue de l'Expertise dans le Consulting

Les missions de conseil sont de plus en plus techniques et demandent de recruter des spécialistes ? L'apport d'expertise est un des principaux arguments commerciaux des cabinets de conseil. Ceci est particulièrement vrai dans le domaine de l'exécution stratégique qui consiste à traduire la stratégie en plan d'actions et à mesurer leurs résultats. Cette activité de conseil demande une profonde expertise pour mesurer la distance qui sépare l'entreprise de ses objectifs stratégiques.

Ceci étant dit, l'expertise peut-être contre-productive dans certains cas. Toute mission d'exécution stratégique intègre un volet de conduite du changement et l'apport d'expertise pure peut le faire oublier. Je me souviens d'une mission où l'objectif était de changer radicalement les méthodes de valorisation des activités d'une entreprise. Notre client avait mobilisé son meilleur expert du domaine et, pour faire bonne mesure, nous en avions fait autant. Résultat : de longs débats d'experts entre nos deux champions qui ont peut-être fait avancer la "science" mais en aucun cas l'exécution de la nouvelle stratégie de notre client. Le projet n'avançait pas comme nous le souhaitions et nous avons dû revoir le staffing de notre mission pour obtenir les résultats escomptés.

Il n'est pas bon de ne peupler un cabinet que d'experts très séniors dans leur domaine. L'expertise requise est inversement proportionnelle à la taille des missions. Les cabinets d'exécution stratégique mènent deux types de mission. Les missions d'expertise amont (définition du business plan, revue du business case...) qui mobilisent uniquement des experts sur une courte période. Et les missions de pilotage de programmes complexes, plus longues avec de larges équipes. Le premier type de mission permet de gagner les secondes ; les secondes permettent de former les consultants... la boucle est bouclée. N'avoir que des experts pour mener les deux types de mission est un mauvais calcul : ils s'ennuieraient et se démotiveraient sur le second type de mission.

Enfin, sur les très grands programmes à plusieurs millions d'euros, il est impossible de mobiliser des experts sur chacun des corps de métier impactés même auprès des Fat Four... Quelles alternatives ? Faire travailler les experts de plusieurs cabinets différents ? L'expérience montre qu'il est plus efficient de ne mandater qu'un seul cabinet avec une équipe plus polyvalente plutôt que de collectionner les spécialistes de différents horizons.

En conclusion, si l'expertise est un des fondamentaux du métier de consultant ; elle est loin d'être une condition nécessaire et suffisante au développement des cabinets d'exécution stratégique. Le véritable facteur clé de succès des cabinets réside dans la capacité intellectuelle et les qualités d'adaptation de leurs consultants.