samedi 20 novembre 2010

Gérer le P&L d'un cabinet de conseil : quelques trucs pour le processus budgétaire

Au XVIIème siècle, certains capitaines de la piraterie avaient innové dans le domaine du management. Pour galvaniser leurs hommes avant l'abordage, ils sabordaient eux-mêmes leur propre navire. Pour leur équipage, il n'y avait donc aucune autre alternative envisageable que la victoire et la prise du bateau ennemi. Certains capitaines d'industrie du XXème siècle ont repris et adapté ces techniques de management. En particulier lorsqu'ils viennent tout juste de prendre la barre de l'entreprise : ils dégradent artificiellement les comptes de la société à grands coups de passage de provisions. Leur objectif est notamment de créer une urgence vis-à-vis de leurs troupes pour les engager plus rapidement dans de lourds programmes de transformation. C'est, dirons-nous, de la conduite du changement.

D'aucuns diront que ces techniques sont intellectuellement malhonnêtes ; surtout, elles font fi des efforts produits par les équipes en place ce qui n'est pas le meilleur moyen pour les mobiliser dans un nouveau plan de développement.

Je préfère de loin m'appuyer sur l'existant pour construire la croissance d'un P&L, dans la continuité de ce qui a été fait, simplement par ajouts successifs. L'idéal est de mobiliser un maximum d'acteurs dans l'établissement du plan de croissance car, croyez-moi, le processus budgétaire peut être un facteur de motivation. Reste ensuite à maintenir cette motivation et là, on parle d'objectivation et de management.


Le processus budgétaire, levier de motivation ?
Vous vous souvenez de la pyramide de Maslow ? C'est une hiérarchie des besoins humains suivant 5 niveaux :
Premier niveau : besoins physiologiques élémentaires
Deuxième niveau : besoins de sécurité correspondant au souci de sauvegarder pour l'avenir la satisfaction des besoins physiologiques
Troisième niveau : besoins d'appartenance à un ou plusieurs groupes ; il s'agit de besoins de type social
Quatrième niveau : besoins d'estime de soi et confiance en soi
Cinquième niveau : besoins d'accomplissement et de création.
Selon Maslow, un besoin de niveau supérieur ne peut agir comme motivation que si le besoin de niveau inférieur est satisfait.

Oubliez le processus budgétaire rébarbatif tel que vous avez pu le connaître et imaginez un processus qui remonte la pyramide de Maslow en partant de l'existant, des résultats tangibles d'ores et déjà produits par les équipes. Vous obtenez ainsi un instrument de motivation au moins à partir du 3ème niveau de la pyramide. Nous sommes alors au niveau du besoin d'appartenance : faites intervenir un maximum de personnes dans le processus avec cette seule question, "comment améliorer les résultats passés (que l'on parle de CA, Marge ou bien de la gestion du cash) ?" Vous verrez alors que votre plan de développement pour l'année prochaine est d'ores et déjà en marche... avant même d'avoir été formalisé! Et au fur et à mesure de l'avancement du processus budgétaire, vous allez faire progresser vos équipes vers les niveaux supérieurs et obtenir ainsi leur mobilisation.


Ne pas confondre management par objectifs et... management.

Il s'agit ensuite d'intégrer ce plan d'action dans un système de direction participative par les objectifs pour faciliter la réalisation des objectifs du cabinet qui seront cohérents avec les objectifs personnels des consultants.

Inutile de multiplier les objectifs personnels ; il faut que leur nombre reste gérable au quotidien pour les consultants. Que veut dire une grille d'objectifs trop longue ? Seulement que le management a une confiance limitée dans ses équipes et essaye de multiplier les "ressorts de rappel" pour tenter de réguler ses collaborateurs de façon automatique sans avoir à s'occuper d'eux pendant un an.

Si vous voulez dépasser vos concurrents, il vous faut construire une stratégie, un plan d'action et des valeurs claires, placer ces valeurs au cœur de toutes vos actions et laisser aux consultants la liberté d'agir en leur faisant confiance pour les respecter.

Pour cela, pas besoin de plus de 5 ou 6 objectifs personnels.

samedi 13 novembre 2010

Consultants : êtes-vous plutôt Porsche ou Logan ?

Porsche, la firme la plus rentable du secteur automobile a bien failli prendre le contrôle de Volkswagen, le numéro un de l'automobile en Europe. Comme tous les producteurs de véhicules moyenne gamme, ce dernier était confronté à de gros problèmes.

Un marché difficile, saturé de concurrents et des clients très exigeants sur les tarifs. Des structures de coûts qui ne permettent qu'aux voitures haut de gamme d'être rentables que ce soit en Allemagne avec Porsche ou BMW, ou en Italie avec Ferrari. Même chose aux USA ou au Japon où ce sont les constructeurs haut de gamme qui tirent le marché.

En France, nous n'avons que très peu de modèles haut de gamme ; nous n'avons pas su ou pas voulu les développer. Les investissements ont été orientés vers les marchés de masse et les segments low cost. Cela pourrait être une bonne idée mais les concurrents restent nombreux et font reculer nos constructeurs nationaux. De là, un risque de cycle infernal : réduction de la rentabilité, réduction de l'innovation et des investissements, réduction des parts de marché...

Les cabinets de conseil sont aujourd'hui confrontés aux mêmes dilemmes que les constructeurs automobiles il y a quelques années : volume versus haut de gamme en petites séries. Les grands gagnants seront-ils les cabinets de conseil en SI et en déploiement d'ERP ou plutôt les cabinets de stratégie aux missions de taille plus modeste mais tellement plus rentables ?

Ce dilemme est aujourd'hui d'autant plus patent en France qu'il y a encore peu d'alternatives nationales aux grands cabinets de stratégie anglo-saxons.

samedi 6 novembre 2010

Gagner en confiance ?

Quels sont les facteurs clés de succès d'un cabinet de conseil ? D'après l'ouvrage de référence Stratégor : "la réputation de la société de conseil et la qualité intellectuelle de ses consultants sont les facteurs clés de succès dans cette activité" (Stratégor, 5ème édition, p 852).

Si la qualité intellectuelle de nos consultants dépend essentiellement de nos critères de sélection à l'embauche et de nos programmes de formation, comment accroître la réputation d'un cabinet ? Les grandes marques ne se sont pas construites en un jour ; pour développer leur notoriété, elles ont dû accroître année après année leur capital confiance auprès de leurs clients.

Pour comprendre comment s'opère ce processus, je propose ici une "formule mathématique" de la confiance client que vous connaissez peut-être :
Confiance = Proximité x Crédibilité / Risque perçu.

Proximité Client
Bien sûr, il faut être proche de ses clients, les connaître intimement pour mieux comprendre leurs besoins. Quand il s'agit de petites missions, il n'y a qu'un nombre réduit de décideurs, c'est facile. Quand on souhaite accéder aux plus grands marchés, il faut embrasser un plus grand nombre de corps de métier, la vente se complexifie. Il s'agit de bien comprendre l'organigramme de son client et l'ensemble des leviers politiques et émotionnels. Côté cabinet, plusieurs intervenants sont alors nécessaires pour assurer un bon niveau de proximité avec l'ensemble des décideurs. Le tout doit être orchestré par des plans de compte commerciaux sophistiqués.

Crédibilité du cabinet
La crédibilité n'est pas qu'une histoire de communication externe. La crédibilité d'un cabinet réside avant tout dans sa capacité à mobiliser rapidement l'ensemble de son expertise sur un sujet donné. Cela passe notamment par un Knowledge Management sans faille, de la veille sectorielle et, idéalement pour les cabinets haut de gamme, des benchmarks. Tout cela doit être régulièrement diffusé sous forme de Point of View : "Publish or Perish".

Risque perçu à travailler avec le cabinet

Passons vite sur le risque de travailler sur des longues périodes avec de très petites structures non pérennes. Parlons plutôt du risque pour le client de voir s'évaporer l'équipe de consultants qu'il a achetée, soit du fait de démissions, soit parce que le cabinet décide de réaffecter ses meilleurs experts à une autre mission vendue par ailleurs. Soyons clairs, ces points relèvent de l'éthique du cabinet et de sa capacité à conserver ses consultants.

Ces points sont essentiels au développement durable du cabinet.

dimanche 17 octobre 2010

Du bon niveau de packaging des offres de Consulting

Tout cabinet qui se respecte, se doit d'avoir un panel d'offres autour de thématiques telles que les Ressources Humaines, la Relation Client, le Marketing, la Finance etc... Ce sont les offres qui permettent de construire l'image d'un cabinet.

Attention cependant au niveau de formalisme de ces offres, deux approches peuvent en effet être retenues :
> une approche très industrialisée qui s'astreint à une description très détaillée des offres méthodologiques et ce, dans l'objectif que cette description soit exploitable par quiconque au sein du cabinet, voire au sein du groupe auquel appartient le cabinet.

> une approche plus "artisanale" pour laquelle l'objectif est plutôt de mettre à disposition des consultants, des "souches" méthodologiques qui sont à chaque fois adaptées aux spécificités des besoins et du contexte du client.


Au delà du delivery, l'approche industrialisée cherche avant tout à modifier radicalement les processus d'avant-vente en raccourcissant les cycles commerciaux et en réduisant les coûts commerciaux (ces offres peuvent être vendues par des forces de vente très juniors).

L'approche industrielle est vertueuse pour les structures d'assistance technique qui souhaitent monter en gamme : dans ce modèle, les commerciaux ne vendent plus des profils mais des offres packagées à forte valeur ajoutée. Cette approche présente également un intérêt dans le cas de missions de certification au regard de normes ou standards car, dans le cas d'espèce, le client s'attend effectivement à des offres très normalisées. Enfin, l'approche industrielle reste valable pour les prestations aux "sucess fees" (exemples : amélioration du BFR, recouvrement, optimisation fiscale...) car, dans ce dernier cas, la création de valeur est explicite pour le prospect.

Pour le reste, il convient d'être très prudent. L'approche industrialisée peut être confrontée à quelques limites pour le développement d'un cabinet de conseil en management. D'abord parce que l'acte commercial dans le conseil est éminemment complexe : il requiert une co-construction avec le client. Ensuite parce qu'il se fonde sur l'intuitu personae qui scelle la relation de confiance entre le décideur et l'Associé. Ce dernier s'engage à délivrer personnellement ce qu'il a vendu. Enfin et surtout parce qu'une offre très packagée est infiniment plus dupliquable par la concurrence : conséquence rapide, les prix sont très rapidement tirés vers le bas. Il est alors dangereux de ne dépendre que de ces seules offres.

Bref, les cabinets de conseil peuvent compléter leur gamme de services par des offres très packagées ; elles leur permettront d'accéder à des relais de croissance supplémentaires. Ces offres peuvent notamment aider certains cabinets à reprendre une dynamique de sortie de crise. Mais ces seules offres ne peuvent prétendre à remplacer la totalité du portefeuille d'activités d'un cabinet de conseil en management. Si tel était le cas, le cabinet descendrait rapidement en gamme.

dimanche 26 septembre 2010

L'Associé doit habiter sa statue

Le statut d'Associé semblerait moins attrayant aux consultants. C'est du moins ce que disent ceux qui quittent leur cabinet pour prendre des responsabilités opérationnelles chez leurs clients. Ceci amène à s'interroger tant sur le contenant que sur le contenu du poste d'Associé.

Le contenant.
La cooptation au grade d'Associé permet à l'heureux élu d'accéder à un statut différent au sien du cabinet. Ceci se matérialise par un "package" qui peut prendre différentes formes d'une firme à une autre : rémunération bien-sûr, accès au capital quand cela est possible, complément retraite, responsabilité d'équipe, participation au comité de direction, voiture de fonction, bureau nominatif à plusieurs fenêtres et moquette épaisse, secrétaire etc... Avec la disparition progressive de l'equity partnership et surtout les réductions de coûts, ces packages ont pu être mis à mal ces dernières années par certains cabinets. D'où cette perte de repère pour les jeunes consultants.

Le contenu
Mais les prérogatives ne permettent pas à elles seules de construire le statut d'Associé. Encore faut il donner corps à ce statut et là, on parle de la personnalité même du coopté. Qu'est-ce que cela veut dire ? Plusieurs ouvrages de management traitent de ce point mais pour tenter de sortir de ces sentiers battus, (re)-lisons un ouvrage consacré à la philosophie du chef par Charles de Gaulle, "un homme qui habitait sa statue" [Alain Peyreffitte]. Publié en 1932, Le Fil de l'épée consacre en effet plusieurs chapitres à dépeindre les qualités requises aux bons chefs militaires.

Certaines qualités sont communes à celles des bons Associés :
> Le Caractère
"Face à l'évènement, c'est à soi-même que recourt l'homme de caractère. Son mouvement est d'imposer à l'action sa marque, de la prendre à son compte, d'en faire son affaire [...] le Caractère imprime son dynamisme propre aux éléments de l'action.". Le Caractère est sans nul doute la qualité première de l'Associé : il est recherché par nos clients qui l'appellent "Conviction" ou "Devoir d'alerte" et il est nécessaire à l'animation des équipes. Par exemple, un "Associé" qui ne sait pas rebondir après un échec commercial va rapidement entraîner son équipe dans sa "dépression" : le mental du manager fait le mental de son équipe. La conclusion est chaque fois la même : la cooptation était prématurée.

> Le Prestige
Un thème cher à l'auteur et qu'il faut rapprocher de celui de la Grandeur des objectifs poursuivis par le Chef. "Il lui faut viser haut, voir grand, juger large [...] Il lui faut écarter ce qui est mesquin de ses façons et de ses procédés." La mise en mouvement des équipes requiert une vision de ce que sera son activité dans 18 mois. La communication de chiffres ne nécessite qu'un comptable pas un Associé. Les consultants attendent de ce dernier qu'il soit en mesure d'élever le débat.

> La Doctrine
"Les principes qui régissent l'emploi des moyens : économie des forces, nécessité de procéder par concentration et, en conséquence, par phases ou bonds, surprise pour l'ennemi, sûreté pour soi-même, n'ont de valeur que par la façon dont ils sont adaptés aux circonstances [...] Apprécier les circonstances dans chaque cas particulier, tel est donc le rôle essentiel du chef. Du fait qu'il les connaît, qu'il les mesure, qu'il les exploite, il est vainqueur ; du fait qu'il les ignore, qu'il les juge mal, qu'il les néglige, il est vaincu [...] Tel industriel, puissamment outillé, se ruine pour avoir méconnu l'état du marché." Attention aux stratégies "me too" qui copient les concurrents, attention à la reproduction des "recettes" du passé. Là encore, il est du ressort de l'Associé de construire le positionnement de ses offres : "construire" requiert des aptitudes de réflexion pas de duplication.


Que retenir de tout cela ?

Deux choses. D'abord, il faut s'attacher à ce que la cooptation continue de marquer le passage à un statut clairement identifié et visible par les équipes. Ensuite, et surtout, il faut veiller à la qualité des cooptations, ne pas céder à la crainte de voir partir des candidats "presque prêts" pour passer au grade d'Associé : il faut s'assurer qu'ils soient en mesure d'habiter leurs statues très rapidement.

samedi 11 septembre 2010

Conseil en stratégie vs. Conseil en organisation

L'industrie du Conseil en stratégie a-t-elle un potentiel supérieur à celui du Conseil en organisation ? Pour répondre à cette question, essayons d'utiliser cette bonne vielle méthode des cinq forces de Michaël Porter. L'objectif est à chaque fois d'identifier les différences entre chacune des 2 industries.

1> Intensité de la concurrence entre les entreprises du secteur Cette force s'analyse habituellement selon 6 critères.

Il apparaît que les 2 industries sont équivalentes au regard de 4 de ces critères :
> Différenciation des services
> Part des coûts fixes et difficultés de stockage
> Barrières à la sortie
> Diversité des concurrents

Par contre, elles différent sur les 2 critères suivants :
> Concentration de l'industrie : le marché du Conseil en stratégie est beaucoup plus concentré que celui du Conseil en organisation, notamment avec beaucoup moins de gros acteurs. Or plus la concentration est forte, moins la concurrence est intense et donc plus l'industrie est normalement rentable.
> Croissance de l'activité : difficile d'obtenir des chiffres quant à la croissance du Conseil en stratégie. Ceci étant dit, ce dernier est plus résistant à la crise. Les clients ont moins de difficulté à investir dans un cadrage stratégique de 3 à 6 mois que dans un grand projet de transformation étalé sur plusieurs années et mobilisant une importante équipe de consultants.


2> Menace des entrants potentiels et barrières à l'entrée.
7 critères sont utilisés pour analyser cette force.

Il y a pour cette "force" de Porter de grandes similitudes entre les 2 métiers :
> Avantages de coût indépendants de la taille
> Différenciation des produits
> Accès aux réseaux de distribution
> Règlements et barrières légales
> Capacité de riposte des firmes en place

A noter cependant quelques divergences pour 2 critères importants :

> Ticket d'entrée dans l'industrie : l'argument de vente des cabinets en stratégie réside dans leurs études comparatives et quantitatives. C'est le résultat de très gros travaux de recherche et d'une capitalisation des connaissances sans faille. Ceci explique qu'il est beaucoup plus difficile d'entrer dans le secteur du Conseil en stratégie que dans celui du Conseil en organisation pour lequel, il n'y a quasiment pas de barrière à l'entrée.
> Économie d'échelle : plus un cabinet en stratégie est important plus il pourra amortir ses coûts de R&D. Pour les autres coûts (marketing, recrutement etc...) les 2 métiers sont équivalents du point de vue de ce critère.


3> Pression des produits et services de substitution
Cette force est usuellement analysée suivant 2 critères :
> Élasticité croisée
> Innovation
Ils ne permettent pas de différencier les 2 industries.



4&5> Pouvoir de négociation des fournisseurs / acheteurs
On utilise 6 critères pour l'analyser.

Les 2 industries ne peuvent être différenciées sur la plupart des critères d'analyse de cette "force" de Porter :
> Concentration relative
> Impact de la qualité des inputs sur la qualité des outputs
> Différenciation des services
> Coût de remplacement du partenaire
> Part du produit fourni dans la structure de coût du client

... sauf une qui pourrait menacer à moyen terme l'industrie du conseil en organisation : la menace d'intégration verticale. De plus en plus de grandes entreprises font du conseil en management : La Poste Conseil (créée en 2006), SNCF Conseil (créée en 2007), Air France Consulting, Safran Conseil, Renault Consulting...

Bref, en conclusion, la méthode de Porter montre que le conseil en stratégie est potentiellement plus attractif que celui du conseil en organisation et que, ce dernier doit impérativement monter en valeur et privilégier l'innovation pour poursuivre une trajectoire de croissance.

Rien que de très intuitif me direz-vous et il n'y avait peut-être pas besoin du modèle de Porter pour arriver à cette conclusion.

Méfions nous cependant de certaines intuitions. On pourrait penser qu'il vaut mieux être un petit cabinet dans un secteur fragmenté (nous avons vu que celui du conseil en organisation, avec ses nombreux acteurs, était plus fragmenté que celui du conseil en stratégie). Le modèle de Porter montre exactement l'inverse : une industrie concentrée est plus rentable qu'une industrie fragmentée, les petits concurrents bénéficient comme les gros des marges élevées qui sont pratiquées dans l'activité. Mais encore faut-il savoir rentrer sur ce marché...

samedi 4 septembre 2010

Théorie de la création de valeur par le conseil

Patrick Besson, Professeur à l'ESCP, et Frantz Rowe, Professeur à l'Université de Nantes, ont tenté d'établir une théorie de la création de valeur par le conseil en management ("Le conseil en management à l'épreuve de la création de valeur pour l'entreprise" - juin 2009).

Cette théorie de la création de valeur identifie 3 typologies de prestation ayant chacune une valeur spécifique : valeur fonctionnelle, valeur normative ou valeur transformationnelle.

Pour plus de détails, cet article est disponible sur le site du SYNTEC Conseil en Management, en synthèse :
> dans le cadre d'une mission créatrice de valeur fonctionnelle, le consultant apporte son expertise pour contribuer au processus de "production" (au sens large) de l'entreprise cliente. Il contribue également au processus de capitalisation et d'enrichissement des compétences de l'entreprise (knowldege factory).
> dans le cadre d'une prestation à valeur normative, le rôle du cabinet réside à trois niveaux : la conception, la diffusion et l'adaptation de normes. Un cabinet peut intervenir aux 3 niveaux (exemple : le BCG avec la matrice du même nom) ou seulement au niveau de la mise en oeuvre (ex : déploiement du Lean Six Sigma ou des balanced scorecards tels que conçus par Kaplan et Norton).
> enfin, la valeur transformationnelle d'une mission de conseil démontre la capacité d'un cabinet à accompagner ses clients dans les évolutions de son business model. La création de valeur se mesure alors par la vitesse du processus de changement de l'entreprise cliente.

Il est intéressant de constater qu'en période de crise, le marché se concentre sur la création de valeur fonctionnelle et la participation aux processus de "production" des entreprises clientes. Bien entendu, même si les volumes baissent, la production requiert toujours l'intervention d'experts fonctionnels et ce type de missions perdure. Le recul des missions normatives peut sans doute s'expliquer par la faible capacité d'investissement des cabinets en période de crise. Les mécanismes de création de valeur normative requièrent en effet la recherche et le développement de nouveaux concepts et aussi du marketing pour diffuser ces normes. Enfin, les clients opèrent également des coupes budgétaires et hésitent donc à lancer de gros projets de transformation. Conséquence : moins de prestations à valeur transformationnelle.

Ceci étant dit, dès la sortie de crise, les cabinets de conseil en management doivent rapidement se préparer à relancer des offres de création de valeur normative ou transformationnelle car ce sont ces offres qui contribuent véritablement à la rentabilité d'un cabinet.

Pourquoi ? Parce que la création de valeur fonctionnelle pour le client n'est mesurée que par le rapport entre la qualité des intervenants et leur prix d'intervention. La rentabilité des missions fonctionnelles dépend principalement de la marge sur les salaires consentie par les clients.

Alors que pour les prestations normatives ou de transformation, la valeur perçue par le client dépasse la seule qualité des intervenants. Le client achète aussi une norme ou, dans le cas des transformations, il achète la crédibilité du cabinet et/ou ses benchmarks. Tout le monde gagne en valeur et la rentabilité des missions normatives ou transformationnelles est supérieure aux missions fonctionnelles.


Si cette sortie de crise se confirme, il faut rapidement retravailler les offres de conseil en management suivant ces trois dimensions de la valeur : valeur fonctionnelle, valeur normative et valeur transformationnelle.

dimanche 6 juin 2010

Un nouveau métier : consultant en réseaux sociaux

Le succès des réseaux sociaux ne se dément pas. Plusieurs se partagent la toile, certains se spécialisent, de nouveaux se développent à grande vitesse et certains déclinent déjà, mais le phénomène est là. D'ailleurs, il inquiète puisque d'aucuns se demandent s'il s'agira à terme d'une autorité alternative à celles déjà en place.

Passons très vite sur les motivations "officielles" des adhérents à ces réseaux : recherche d'opportunités professionnelles et commerciales, recrutement, échanges d'idées, de contacts etc...

Plus intéressant, il y a au moins 5 ressorts cachés derrière le succès des réseaux sociaux. D'abord l'exemple des autres : nous avons naturellement tendance à copier nos agissements sur ceux des autres. La sympathie : plus nous apprécions notre interlocuteur, plus il est susceptible de nous convaincre de faire ou d'accepter quelque chose. La réciprocité : nous rendons des services aux personnes qui nous ont aidés. La cohérence dans l'engagement : nous avons une conduite cohérente avec les valeurs de notre communauté. L'autorité : nous avons besoin d'experts crédibles qui nous indiquent ce qu'il convient de faire, de croire ou de décider.

Or, ces 5 "ressorts" sont les principes même qui sous-tendent tout processus de persuasion (en fait, pour être exhaustif, il en manque un : la rareté ; plus une ressource est rare, plus nous la voulons). Rien d'étonnant donc à ce que les responsables marketing s'intéressent aux réseaux sociaux et ce, d'autant plus que les consommateurs privilégient de plus en plus la communication en "peer to peer" (de consommateur à consommateur). C'est dans les services financiers où ce phénomène de "court-circuitage" semble le plus patent à l'heure où la cote de confiance des banquiers est à la baisse. Le (petit) investisseur a plus confiance dans des conseils récoltés sur des chats internet que dans ceux de son banquier. Cela peut aller jusqu'à la suppression pure et simple de l'institution financière dans la mise en oeuvre dudit service. Exemple : le site Zopa (Italie, Japon, UK et USA) qui propose des services de crédit à la consommation de particulier à particuler. Sa devise :"with no banks in the middle, everyone gets better rates".

Il y a donc urgence à réagir ! Les Directeurs Marketing vont rechercher de plus en plus de solutions pour rester dans "la boucle" de la persuasion de leurs consommateurs. De nouveaux besoins et donc, avec eux, de nouvelles offres de Consulting qui commencent à voir le jour.

Deux limites, cependant à l'exercice. D'abord, la forte pondération requise pour manier ce canal de communication : éviter à tout prix la manipulation grossière qui, aussitôt démasquée, serait contre-productive pour son instigateur. Deuxième frein à ce type de marketing : les différences culturelles (sans rentrer dans les détails, un asiatique n'utilise pas les réseaux sociaux de la même manière qu'un nord américain) qui ne permettent pas la mise en place d'opération marketing unifiée.

samedi 22 mai 2010

La reprise se confirme

J'ai connu trois crises des activités de Business Consulting. Elles avaient toutes en commun d'avoir débuté par une forte dégradation des affaires dans le secteur Financial Services. A chaque fois, c'était ce secteur qui était le premier touché puis venait le tour du secteur Industrie et Services. Les activités du Secteur Public quant à elles jouaient le rôle d'amortisseur. De même, à chaque fois, la reprise des cabinets de conseil s'est faite sentir d'abord dans le secteur Banque Assurance puis ensuite venait la reprise du reste des activités.

Il est clair qu'en ce mois de mai, on peut confirmer que les activités de conseil ont fortement repris dans le secteur financier. Les grands clients comme BNPP et SG se portent de mieux en mieux et surprennent encore les analystes avec leurs très bons résultats du premier trimestre.

Très logiquement, les investissements reprennent en particulier dans le domaine du réglementaire : Bâle II, déjà Bâle III dans le secteur bancaire et Solvency II dans le secteur de l'assurance. Sur ce dernier sujet, les interventions sont en train de passer des mains des actuaires aux consultants financiers pour très bientôt passer aux mains des consultants en organisation. De très belles missions de conseil à la clé. Par ailleurs, d'autres investissements sont relancés par les institutions financières dans le marketing et on ressort également des tiroirs les très gros dossiers de transformation métier.

Bref, des signaux très positifs de relance des activités de Business Consulting et ce, très bientôt pour l'ensemble des secteurs.

Il s'agit maintenant pour les cabinets de bien gérer cette reprise, notamment en évitant d'emblée de lourds investissements qui rehausseraient brutalement le point mort des firmes de conseil. L'objectif doit rester la rentabilité et non la course à la taille à marge zéro. Pour ce faire, il faut rester exigent sur la valeur des missions délivrées à nos clients et privilégier les partenariats stratégiques.

samedi 10 avril 2010

La valeur du conseil

La pression des services Achats de nos clients et l'arrivée de nouveaux entrants proposant des missions d'Interim management plutôt que de véritables prestations de conseil, ont généré certaines mauvaises pratiques de valorisation de nos interventions. Ces dernières ne doivent pas être valorisées de façon trop mécanique par un nombre de jours.hommes multiplié par un taux journalier moyen (TJM), lui-même fixé au regard du salaire des intervenants. Non, le pricing de la prestation doit tenir compte de la valeur ajoutée apportée par le cabinet de conseil. Encore faut-il savoir définir la valeur d'une mission de conseil.

Passons vite sur les missions à retours sur investissement quantifiables et rapides, comme par exemple les missions d'amélioration de la trésorerie, d'analyse d'exhaustivité du CA ou encore d'optimisation fiscale. La notion de valeur du conseil est tellement claire dans ce cas que les cabinets proposent une rémunération aux résultats (success fees).

Dans les autres cas, quelles sont les caractéristiques d'une mission qui permettent d'en déterminer la création de valeur ?


Si l'on commence par les caractéristiques les plus simples, d'abord le niveau d'expertise des consultants et donc la qualité des recrutements du cabinet. Ensuite la qualité des formations méthodologiques, comportementales et métier qui permet de maintenir les équipes au meilleur niveau. La gestion des connaissances au sein du cabinet (Knowledge management) qui permet d'enrichir les consultants des expériences de leurs collègues. La qualité de la Recherche et de la veille sectorielle du cabinet, des études comparatives menées auprès de panels de clients (benchmarks). Enfin l'apport méthodologique et les transferts de connaissance du consultant vers son client. Ces caractéristiques ont effectivement une valeur (et un coût) et restent simples à appréhender (et à vérifier) pour nos clients.

Arrivent ensuite des caractéristiques plus difficiles à apprécier et qui sont pourtant déterminantes dans l'analyse de valeur d'une prestation de conseil.
D'abord le fameux "devoir de conseil ou devoir d'alerte" qui peut amener un consultant à remettre en cause les idées initiales d'un client. Ensuite et surtout, la capacité d'entraînement du consultant qui va emmener les équipes de son client vers un objectif donné. Enfin, le volet conduite du changement est un des apports indéniables du consultant.

Cette seconde famille de caractéristiques génère encore plus de valeur que les précédentes car ce sont elles qui font qu'une transformation organisationnelle réussisse... ou pas.

Le problème est que ces dernières caractéristiques sont plus difficiles à apprécier a priori par le client et sont donc moins bien prises en compte lors de la négociation sur le prix de la mission.

lundi 5 avril 2010

Swim upstream ?

Dans son livre Made in America [Bantam Books, 1993], Sam Walton explique les dix règles qui expliquent le succès de Wal-Mart. Il s'agit des "Sam's Rules for Building a Business".

La dernière règle, Rule 10, est intéressante. "Swim upstream. Go the other way. Ignore the conventional wisdom. If everybody else is doing it one way, there's a good chance you can find your niche by going in exactly the opposite direction. But be prepared for a lot of folks to wave you down and tell you you're headed the wrong way. I guess in all my years, what I heard more often than anything was : a town of less than 50,000 population cannot support a discount store for very long."

Si on appliquait cette règle à quelques principes admis du Management Consulting, serait-on en mesure de dégager des idées nouvelles permettant de se différencier de la concurrence ?


Pyramide des grades ?
L'organisation de tout cabinet repose sur une pyramide des grades. Les seniors vendent et pilotent les missions. Les juniors produisent sous leur supervision et permettent de dégager la rentabilité des missions. Pourrait-on imaginer des cabinets avec des techniques de vente qui permettraient d'augmenter encore le ratio juniors / seniors ? Ou à l'inverse, des modalités de delivery qui permettraient de le diminuer tout en dégageant une bonne rentabilité ?

Course à la taille ?
Seuls les grosses firmes peuvent fournir des prestations globales aux très grandes entreprises implantées à l'international. Pourrait-on imaginer des fédérations de petits cabinets ayant encore plus d'efficacité dans la réalisation de ces missions parce que plus proches culturellement de leurs clients ?

Honoraires, rien que des honoraires ?
Bien sûr, les cabinets ont progressé sur ce volet, crise oblige. Des rémunérations aux résultats (success fees) sont de plus en plus souvent proposées aux clients. On peut encore aller plus loin : intéressement aux résultats de l'entreprise cliente, octroi d'actions, création de structures conjointes etc...

Le Consulting, un marché de grandes entreprises ?
Les grandes firmes de conseil s'adressent principalement aux grandes entreprises. Le marché des PME est mal adressé. Quelles techniques commerciales mettre en œuvre pour améliorer la connaissance de ce marché et accroître le niveau de proximité ? Quid de GIE ou autres instances permettant de partager les coûts pour permettre à de petites structures d'accéder à des prestations de service de haut niveau ?

Liste non exhaustive bien évidemment...

dimanche 28 mars 2010

Gestion stratégique : la 3ème dimension

Une entreprise revêt à la fois 3 formes différentes : c'est une entité de transformation de matières premières, une organisation humaine qui doit être régulée et aussi, un espace politique où s'expriment des débats, des idées et des logiques différentes. J'ai retrouvé cette semaine une vieille analyse (elle date de 1981) de Raymond-Alain Thietart qui n'en reste pas moins d'actualité. Dans cette étude intitulée "La stratégie mixte et ses syndromes" [Harvard-l'Expansion, automne 1981, p 46 à 56], l'auteur analyse les 3 dimensions de la gestion stratégique : la dimension économique, la dimension organisationnelle et la dimension politique et surtout, il analyse les syndromes ou dysfonctionnements engendrés par une trop forte focalisation sur deux voire une seule dimension au détriment de la troisième.

L'espace à 3 dimensions de la gestion stratégique est ainsi caractérisé par 8 points - les sommets d'un cube - qui correspondent à des syndromes typiques et des fonctionnements différents pour l'entreprise. A titre d'exemple, si seule la dimension organisationnelle est prise en compte, le dysfonctionnement est qualifié de "bureaucratique". Si seule la dimension économique est privilégiée, il s'agit d'un dysfonctionnement "technocratique" etc... Bien sûr, l'objectif est de prendre en compte de façon équilibrée les 3 dimensions.

La crise a eu pour vertu de focaliser les entreprises sur les dimensions économique et organisationnelle, dans un objectif de recherche d'efficacité. Cela a permis aux cabinets de conseil de mener - et de continuer à mener - de nombreuses missions de maîtrise des coûts (méthodes ABC, TCO, EVA, chaîne de valeur etc...) et des missions de refonte de processus (méthodes BPR, Lean, Six Sigma etc...).

La question est de savoir si cette focalisation ne s'est pas faite au détriment de la dimension politique. Ce syndrome dans l'analyse de R.A. Thietart est appelé "Mécanique aveugle", il fait référence aux principes des organisations tayloriennes.

En tant que consultant, je dirais que si les chantiers économiques et organisationnelles ont été menés dans le cadre d'un programme global d'entreprise, la dimension politique a forcément été prise en compte dans la préparation des différents chantiers : constitution des groupes de travail, remontée et échanges des meilleures pratiques, libre diffusion des idées et des sachants au sein de l'entreprise etc...

Si par contre, les dimensions économiques et organisationnelles n'ont été prises en compte qu'à travers de petites projets déconnectés les uns des autres, sans vue d'ensemble ; il y a fort à parier que la dimension politique a été délaissée dans la gestion stratégique choisie par l'entreprise.

Comment reprendre en main très rapidement la dimension politique ?
Il s'agit d'enclencher très rapidement un processus de visioning. Dans ce processus, le leader partage avec un groupe de collaborateurs clés l'élaboration d'un cadre stratégique qui "donnera le ton" et incitera au travail collectif le reste de l'entreprise. Le débat d'idées est alors relancé autour de la construction d'un objectif stratégique commun et d'une ambition partagée par chacun pour l'entreprise.

Le leader incarne alors le rêve collectif : il injecte les idées de départ, témoigne du souhait d'évolution, installe le processus de discussion, consolide la vision partagée puis la communique, la communique et... la communique.

Inutile de dire que le processus de visioning est complexe à mettre en œuvre, surtout la première fois. Sans doute une opportunité pour les cabinets de conseil spécialisés.

samedi 20 mars 2010

Cabinet de conseil au sein des SSII : le temps des dilemmes

L'année 2009 a été très difficile pour les cabinets de conseil. Décroissance de l'activité, dégradation de la rentabilité, réduction des effectifs etc. En ces temps où l'on commence à espérer une reprise des prestations de conseil et ce, dans de nombreux secteurs : public, banque, assurance, énergie et utilities ; beaucoup de SSII détenant une activité de consulting vont être confrontées à un dilemme. C'est un dilemme classique de sortie de crise : faut-il réinvestir ou au contraire désinvestir dans les activités de consulting qui, pour certains acteurs, se sont vidées de beaucoup de leur substance ?

Bien sûr, ce dilemme ne se pose pas pour les grosses SSII de plus de 5,000 personnes. D'abord parce que le Business Consulting reste le plus sûr moyen de se positionner en amont des très gros chantiers de transformation. Mais surtout, parce que la part du Business Consulting dans leurs activités contribue à rehausser la valorisation de leur entreprise. La part du CA Consulting dans le CA global de la SSII permet en effet aux analystes financiers d'apprécier la capacité de l'entreprise à améliorer encore sa valeur ajoutée à moyen terme. Avoir de grosses activités de conseil permet, en période de croissance, d'améliorer leurs cours de bourse. Ces acteurs devraient donc normalement continuer d'investir et de développer leurs activités de conseil.

Pour les plus petits acteurs informatiques (moins de 3,000 personnes), renflouer ces activités de consulting sera par contre problématique. C'est un marché fondé sur la compétence et l'intuitu personae plus que sur des offres packagées et disponibles sur étagère. Le facteur humain est prépondérant. Attirer les équipes requises prendra du temps et, faute de taille critique, ces activités de conseil en management ne permettront pas à ces SSII de faire la différence. Maintenir de trop petites équipes de consultants n'aura malheureusement que peu d'effet sur la valorisation de l'entreprise. Il est donc fort probable que nous assistions cette année à plusieurs désinvestissements de la part des petites SSII qui vont se recentrer sur leur métier de base, quitte à y revenir... dans quelques années.

samedi 13 mars 2010

Business Consulting & IT Consulting : quels défis pour 2010 ?

Toutes les grandes firmes de conseil se doivent de proposer à leurs clients des offres de Business Consulting (grands projets de transformation, réorganisation et conduite du changement) et d'IT Consulting (Urbanisme des SI, Sécurité informatique et assistance à la refonte du SI). Ces activités sont bien évidemment complémentaires tant il est vrai que toute décision stratégique est retranscrite très rapidement dans le SI.

Les délais de retranscription des nouvelles orientations stratégiques dans le SI se doivent d'être de plus en plus courts. On assiste même à des aller-retours entre technologie et stratégie, des opportunités nouvelles rendues possibles par la première alimentant la seconde. Bref, un des défis pour les grands cabinets va être dans les prochaines années de gérer Business Consulting et IT Consulting non plus, comme deux offres à proposer successivement à leurs clients mais plutôt comme deux offres à proposer simultanément.

Le jeu en vaut largement la chandelle car les opportunités de business à venir sont nombreuses. La première sera, sans nul doute, celle du cloud computing. Pour stimuler l'industrie sur ce sujet considéré par le gouvernement français comme "un enjeu absolument majeur" [discours de François Fillon du 18/01/2010], le grand emprunt a prévu d'allouer pas moins de 700 millions d'euros au cloud computing.

Les grands acteurs de l'industrie informatique vont mettre en avant leurs solutions censées apporter une plus grande flexibilité aux entreprises en matière d'exploitation de leur SI. Est-ce que cela sera suffisant ?

A mon sens, ceux qui parviendront à dominer ce marché auront des offres de Business Consulting [BC] et d'IT Consulting [ITC] imbriquées pour proposer d'emblée aux entreprises :

1> d'analyser les coûts de leurs services informatiques utilisés pour les aider dans la décision "make or buy". Pour ce faire, il s'agira d'utiliser des méthodologies standards de BC comme l'Activity-Based Costing

2> sur ces bases économiques, il s'agira ensuite de spécifier les services qu'il aura été décidé d'externaliser dans les "nuages". Mission classique d'ITC.

3> pour chacun de ces services, des missions ITC permettront de résoudre les problématiques de sécurité et d'architecture réseaux.

4> ensuite viendra l'analyse des impacts RH et la préparation de la conduite du changement : missions classiques de BC

5> le tout sera consolidé dans un plan de déploiement qui devra être suivi par des experts métiers [BC] et techniques [ITC].

La capacité des grandes firmes à combiner intimement le Business Consulting et l'IT Consulting va devenir un enjeu de différenciation concurrentielle.
Le Cloud computing n'en est qu'un des tout premiers exemples.

samedi 6 mars 2010

Consulting : où est l'innovation ?

J'ai récemment parcouru une étude sur les achats de prestation de conseil. L'auteur y regrettait le système de référencement des grands comptes qui, selon lui, ne permettait pas aux petits cabinets de travailler pour ce type de clients. En fait, l'étude sous-entendait que ces clients se privaient de la créativité et de la capacité d'innovation des petits cabinets, laboratoires à innovations.

A quelques exceptions près, l'innovation est rarement présente au sein des petits cabinets. Ou alors il s'agit de toutes petites structures pilotées par des enseignants-chercheurs : leurs missions ne sont pas l'activité principale de ces structures, ce sont plutôt des "alibis", des sources d'information - ou plutôt d'inspiration - pour les thèses universitaires et les ouvrages de management qui y sont produits. Pour le reste, quand on parle de petits cabinets de conseil classiques, à "vocation commerciale", leur capacité d'investissement est trop faible pour se consacrer à l'innovation. Ils proposent une expertise sur un secteur d'activité ou une méthodologie pré-existante mais pas d'éléments véritablement innovants.

Est-ce que l'innovation est alors plutôt développée par les grosses firmes de conseil ? En théorie, la capacité d'investissement y est meilleure mais là encore, sauf quelques exceptions, la créativité est décevante. Les investissements sont plutôt consacrés à des formations Six Sigma ou Lean Management et autres standards méthodologiques mondiaux. La raison en est simple, seul ce type d'investissement permet de se positionner sur les très gros projets de transformation. Pour tout autre investissement, le pay back est trop lointain.

Dans quelles mesures alors les cabinets de conseil peuvent-ils encore être innovants dans les prestations qu'ils délivrent à leurs clients ? Selon moi, en participant à des groupes de travail, des comités scientifiques en liaison avec des universités et des instituts de recherche. A l'instar de ce qui a pu être fait avec CMMi pour l'informatique et eSCM pour la fonction Achats. Encore faut-il bien veiller et entretenir la qualité des liens tissés avec le milieu de la recherche : implication de consultants dans les cursus de formation, accueil de thésards et de stagiaires dans les cabinets, articles et études co-produits etc.

samedi 27 février 2010

Gestion d'un P&L Consulting : quelques petits trucs

Sur le chapitre "comment gérer un P&L d'une activité de Conseil", je suis toujours étonné par l'importance extrême accordée par mes homologues au volet quantitatif. Je ne suis pas certain que l'on développe une practice en se focalisant sur les seuls indicateurs de taux d'utilisation, de taux journalier moyen et de délai de paiement. Je suis convaincu que le quantitatif découle plutôt du qualitatif, à savoir pour nos activités de prestations intellectuelles, de la bonne gestion de nos consultants. Si vous développer au sein de vos équipes une culture de la performance, nul doute que vos honoraires, votre staffing et votre TJM seront à la hausse. La question est donc de savoir mettre en œuvre une telle culture. J'ai listé ci-après quelques uns de mes trucs.

Privilégier l'informel et la convivialité. Une réunion tous les 15 jours avec les Associés et les Senior Managers pour suivre le business. Nul besoin de demander des reportings complexes, favoriser juste la participation active à cette réunion et multiplier les échanges au sein de l'équipe. Surtout pas de management à coup de mails et de tableaux Excel à remplir en 48h. Autre point important pour développer la convivialité, faites confiance aux gens. Bien sûr, recruter les meilleurs et, au début, tester les. Mais une fois que vous vous êtes assuré de leur fiabilité, ne les brider surtout pas dans leurs développements. Je suis persuadé que la convivialité est un véritable avantage concurrentiel pour un cabinet de conseil.

Diffuser les bonnes idées. Je dois avouer que je me comporte comme une éponge. Dès que j'identifie une bonne pratique ou une idée originale, je me dépêche de la généraliser à l'ensemble des équipes. Attention, si vous voulez que chacun s'approprie cette nouvelle idée, diriger le projecteur sur l'idée et non sur son auteur.


Se dépasser.
Certes toutes les entreprises ont leur processus budgétaire et il est nécessaire pour piloter l'activité. Mais je me refuse à rentrer dans ce petit jeu auquel on assiste souvent entre des consultants qui proposent de faire 10 face à une direction qui attend 20. Après plusieurs heures de marchandage, on inscrit au budget un objectif de 15. C'est regrettable. Je préfère amener les équipes dans un système qui les invite à se dépasser par rapport à leur marché et les moyens à leur disposition. On ne parle alors que de croissance et toujours dans une perspective de développement. Bien sûr, en corollaire, le système d'évaluation doit permettre d'identifier ceux qui ont effectivement essayer de se dépasser de ceux qui se contentent de négocier à la baisse leurs objectifs.

Communiquer et célébrer toutes les bonnes nouvelles. Le moral de l'équipe est sans doute le meilleur indicateur avancé de votre business des tout prochains mois. Il n'y aucune raison que notre activité de consultant soit ennuyeuse, bien au contraire. Je communique systématiquement et j'incite à fêter toute nouvelle mission. C'est une excellente manière de dynamiser les équipes. Have fun in your job !

samedi 20 février 2010

Votre banquier est-il crédible ?

De récents sondages auprès du grand public montreraient que la crédibilité d'un banquier est aujourd'hui inférieure à celle d'un assureur. Ce n'était pas le cas il y a 10 ans et il faudra sans doute une décennie pour que les banquiers parviennent à redorer leurs blasons. Conséquence de cette perte de confiance, les (petits) investisseurs font plus confiance à un conseil glané sur un chat internet qu'à un avis professionnel.

Cette tendance ne s'observe pas que dans le domaine financier. Deux exemples très différents : Wikipédia et Linux. Si vous devez aujourd'hui effectuer une recherche documentaire, votre réflexe sera plutôt de vous connecter à Internet que de feuilleter les pages d'une encyclopédie. Non seulement par facilité mais aussi parce que vous aurez le sentiment d'avoir une information plus récente et, en quelque sorte, "auto-contrôlée" par des milliers d'internautes. De même, l'intérêt pour les logiciels libres se fonde non seulement sur la gratuité des produits mais aussi sur leur maintenance en quasi temps réel par des internautes aussi passionnés que bénévoles.

Si l'on reste sur l'exemple de Linux, de grandes sociétés informatiques ont rapidement compris le potentiel de ce marché. Après de gros investissements autour de ces solutions gratuites, elles ont transformé leur portefeuille de services. Résultat : aujourd'hui, le business développé par ces sociétés autour de Linux est largement supérieur à celui réalisé autour des systèmes classiques.

Nous sommes en train d'assister au même phénomène dans le secteur bancaire : l'épargnant se détourne de son conseiller financier-distributeur et préfère gérer son patrimoine lui-même sur la base de comparateurs de produits financiers et d'informations récoltées sur des forums Internet. A l'instar des sociétés informatiques avec Linux, les banques se réorganisent pour s'adapter à ces nouvelles tendances. Leurs sites Internet ne sont plus des sites de courtage mais des sites d'échange et de réflexion. Plusieurs banques en ligne se sont récemment créées sur ce principe, ce n'est qu'un début.

La mise en oeuvre de ces nouveaux concepts et la création ex nihilo de ces nouvelles banques constituent bien sûr une opportunité business pour les cabinets de conseil. C'est surtout une formidable opportunité de repenser la banque dans sa relation avec l'épargnant.

samedi 13 février 2010

Tendances de début d'année ?

Les précédentes crises dans le secteur du Conseil se sont caractérisées par un ralentissement brutal des prestations dans le secteur bancaire et ce, quelques mois avant que cette même crise ne touche les autres secteurs d'activité, notamment ceux de l'industrie et des services. A chaque fois, la reprise s'est également manifestée d'abord dans le secteur bancaire.

La crise actuelle a confirmé le premier principe avec une réduction des missions auprès des établissements financiers à partir du 2ème trimestre 2008. Ce n'est qu'après que les autres secteurs ont été touchés.

Nous assistons depuis octobre dernier à un redémarrage des missions dans le secteur Banque & Assurance. En particulier pour des prestations d'organisation et surtout autour du marketing. Les banques essayent de se repositionner par rapport à leurs différents segments de clientèle et de se redonner une image de marque.

Est-ce à dire que nous entamons une reprise sur nos activités ? Cela me semble un peu tôt pour le dire après seulement quelques mois de bons résultats. Il est clair que la consommation des ménages a repris depuis l'été dernier et que si la relance des crédits se confirme, nous disposerons effectivement des fondamentaux nécessaires à la croissance de nos clients. Éternel optimiste, c'est ce que je veux croire mais il faut rester prudent dans nos investissements.

Sur quels sujets s'agit-il justement d'investir ? Dans le secteur bancaire, nous l'avons vu, l'heure est à la relation client et au marketing. Dans le secteur industriel, nous sortons d'une période très "lean management" qui a bridé l'agilité des entreprises. Il s'agit maintenant de recouvrir cette agilité, notamment dans la gestion des stocks et des fournisseurs : il est probable que la fonction Achat requière à nouveau des prestations. Côté Secteur Public, il s'agit toujours de piloter les coûts et de mutualiser des services.